Le Pr Olivier Guérin est le nouveau Président du CNP de Gériatrie

Quelles sont les composantes du CNP de Gériatrie ?

Le CNP de gériatrie n’est pas une association de membres physiques mais une association d’institutions. Il représente donc le métier de gériatre dans toutes ses formes, de l’EHPAD à l’hôpital, en exercice salarié public ou privé comme en exercice libéral, et je le défendrai dans toute sa diversité d’exercice.

Il existe 8 composantes et le Président ne peut être issu que de deux d’entre elles, la SFGG (Société Française de Gériatrie et Gérontologie) et le CNEG (Collège National des Enseignants de Gériatrie).

Ces composantes sont :

  • La SFGG présidée par Nathalie Salles
  • Le CNEG, présidé par Gaëtan Gavazzi
  • Les Fédérations de médecins de coordinateurs, la FFAMCO et MCOOR présidés par Odile Lévy et Nathalie Maubourguet
  • Le Syndicat national de la gériatrie clinique (SNGC) présidé par Anne Bréard
  • L’Association Nationale des Gériatres d’exercice libéral (ANGEL) présidé par Christophe De Jeager
  • Le Syndicat des médecins coordonnateurs en EHPAD (SMCG-CSMF) présidé par Pascal Meyvaert
  • L’Association des Jeunes Gériatres (AJG) présidée par Fanny Durig

 

Quel est le rôle du CNP ?

Le CNP de Gériatrie est l’instance représentative de la gériatrie française, chargée de centraliser l’expertise gériatrique pour tout sujet, puisqu’il regroupe toutes les institutions, associations, syndicats, représentations en gériatrie.

Par exemple, le Président du CNP a été saisi par Franck Chauvin pour la stratégie décennale de soins palliatifs et il s’est chargé ensuite de dispatcher à la bonne composante et aux experts concernés. Il gère en opportunité, quand on fait appel à lui, que ce soit de répondre à la Cour des Comptes, à la HAS, au Haut Conseil en Santé Publique, à Santé Publique France, puis mène lui-même des sujets de fond, propres au CNP, comme le sujet de la certification périodique – car il faut le rappeler, nous ne serons plus médecins à vie ! Mais nous devrons nous acquitter de mise à niveau en connaissances et compétences, qui seront définies avec les CNP).

Pour les demandes extérieures, l’HAS a par exemple récemment décidé de rédiger une recommandation sur le psycho-trauma de la personne âgée. Elle s’est donc tournée vers le CNP qui a créé un groupe de travail constitué d’Anne-Julie Vaillant-Ciszewicz, Jean Roche et Sylvie Bonin-Guillaume, issus du conseil scientifique de la SFGG. En synthèse, le CNP est l’interlocuteur de toutes les institutions, et est la seule représentation règlementaire (et ce pour toutes les spécialités médicales, évidemment, qui sont regroupées au sein de la FSM, Fédération des Spécialités Médicales).

Sous quelle signe souhaitez-vous placer votre présidence (qui va durer 3 ans) ?

 

Nous arrivons à un moment critique avec à la fois le mur du vieillissement démographique qui se profile devant nous et une diminution très sensible dans le même temps du nombre de professionnels du soin et des métiers du lien, alors que par ce même vieillissement de notre population les besoins vont augmenter fortement. Nous avons donc un défi immense, en très peu de temps, pour mettre en place une organisation et un système aptes à les prendre en charge de façon satisfaisante.

La clé est dans le fait d’arriver à organiser tout le système de santé autour de la personne âgée. Ce sera LE sujet de la santé et de la prévention pour le bien vieillir, c’est-à-dire, « vieillir en santé et en autonomie ».

Nous devons donner une réponse à nos concitoyens : mais comment faire mieux avec moins ?

La solution pour moi est de s’intéresser d’abord à la structuration des parcours de prévention pour vieillir en santé et en autonomie. Nous savons ce qu’il faut mettre en œuvre et il faut pour cela utiliser toutes les ressources sur un territoire, sanitaires, médico-sociales, mais aussi les associations et les collectivités. Mon rêve serait de créer des structures de soin primaires organisées dans les territoires pour prendre en charge tout le monde et notamment les oubliés du système de santé (notamment les âgés isolés), qui n’ont accès au système de santé que par les services d’accueil des urgences, ce qui est une catastrophe.

Il faut absolument créer ce modèle d’équité, de prévention et de soins territorialisés structurés, finalement, un modèle type CPTS « up-gradées » comprenant des compétences de médecine populationnelle (dont la gériatrie bien sûr).

Actuellement le système de soin est injuste : ceux qui y ont accès sont ceux qui en ont le moins besoin. En d’autres termes, si vous êtes âgés, pauvres et isolés, vous n’avez pas accès au soin alors que c’est vous qui en avez le plus besoin… Cela n’est pas acceptable ! 

Nous disposons en France d’un très bon système de santé pour la couverture financière mais pas pour son accès. C’est bien d’être remboursé, mais encore faut-il être remboursé de quelque chose…

 

Quel message, en tant que nouveau Président du CNP, souhaitez-vous adresser aux gériatres ?

 

Je voudrais leur dire qu’ils exercent la discipline médicale la plus moderne, car nous sommes les spécialistes médicaux du vieillissement, le sujet d’intérêt principal des 20 prochaines années. Cela fait longtemps que nous avons compris que le soin ne se réduit pas à l’acte médical : nous avons besoin des autres métiers du soin (soignants comme les IDE ou les aides-soignants, les kinésithérapeutes, les orthophonistes, les podologues, les ergothérapeutes, les diététiciens,…) mais aussi des professionnels des sciences humaines et sociales (psychologues cliniciens, neuropsychologues, anthropologues, sociologues, démographes, géographes,…), des sciences du mouvement humain (pour l’activité physique adaptée), des travailleurs sociaux, etc.

Pour rester en bonne santé, nous n’avons pas besoin uniquement du docteur en médecine et ceci, les autres spécialités l’ont peut-être moins intégré, et depuis moins longtemps. C’est l’ADN de notre spécialité de gériatrie.

Les gériatres font le métier le plus d’actualité et très utile pour la population.

De plus, ils sont très impliqués dans l’innovation, sociale, organisationnelle, et digitale.

 

Quel message, en tant que nouveau Président du CNP, souhaitez-vous adresser aux pouvoirs publics ?

 

Il faut absolument remettre le vieillissement de santé au cœur de toutes les préoccupations de l’État.
Il faut en priorité :

  •  Revoir les organisations du système de soin tenant compte de ce que l’on sait maintenant pour les patients âgés
  • Intégrer que la prévention, nécessité absolue au moment où la réponse sanitaire devient rare, doit cibler l’état de santé, mais aussi la préservation de l’autonomie
  • Enfin et surtout, changer notre regard sociétal sur le vieillissement

Sur le sujet de l’environnement il commence à y avoir une planification stratégique. Sur la question du vieillissement rien ne se passe : pire, on se détourne du problème. Or, les deux grandes transitions des 20 ans qui viennent (la transition climatique et environnementale, et la transition démographique du vieillissement de l’Humanité) sont au même niveau d’impact sur nos sociétés. Il est temps de le réaliser.

La première chose à mettre en œuvre du côté du monde de la santé c’est d’avoir une vision, et des actions, plus intégratives, plus globales de l’état de santé, et en organisant la prévention.

Préserver l’état de santé d’une population qui vieillit permettra de garder plus de gens en bonne santé et en autonomie le plus longtemps.

L’innovation digitale aura certainement une place de plus en plus grande dans la santé et les métiers du lien.

Comme il y a de moins en moins de professionnels, alors que les besoins vont exploser, il va falloir trouver d’autres moyens qui ne seront pas tous humains. Au Japon et en Corée du Sud la robotique est un modèle privilégié. Notre culture européenne n’y est cependant pas prête. Il nous faudra trouver cette voie intermédiaire, alliant humain et digital, dans l’intérêt des professionnels et des usagers.

 

Vous succédez au Pr Claude Jeandel. Comment vous situez-vous par rapport à son mandat ? 

Claude Jeandel a vu la création du CNP et a assuré sa présidence les 8 dernières années. Il a réalisé un travail incroyable et je m’inscris, bien sûr, pleinement dans sa continuité. Il reste d’ailleurs sous mon mandat mon conseiller spécial afin que l’on puisse travailler ensemble, main dans la main avec tous les présidents des composantes que je suis très content et fier de représenter. Je partage avec chacun d’eux la même vision de la place de la gériatrie et nous allons collaborer avec confiance et efficacité.

Quelles sont les nouvelles perspectives du métier de gériatre ?

Aujourd’hui, le sujet sur lequel nous travaillons, notamment, ce sont les missions du médecin coordonnateur en EHPAD. Le travail est en train d’être fait avec la FFAMCO et MCOOR. Demain, le médecin coordonnateur gardera bien sûr son rôle de coordination et renforcera sa vision transversale du parcours. C’est important qu’elle soit pérennisée et que le soin ne prenne pas toute la place car le besoin de coordination globale, dans un EHPAD, est majeur.

S’occuper d’une personne âgée en EHPAD, ce n’est pas que lui faire des prescriptions bien au contraire.

Ensuite, il faut travailler à la valorisation du métier de gériatre à l’hôpital. Et bien sûr dans un contexte plus global de valorisation des carrières médicales pour toutes les spécialités. La gériatrie hospitalière est cependant une des spécialités où il est le plus difficile de recruter. Cela doit poser question.

Enfin, nous prônons l’essor de l’exercice libéral de la gériatrie, encore confidentielle, en articulation avec les soins primaires et les établissements.

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